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Scarron ou Saint-Amant, ni Racine dans les Plaideurs (c’est, du reste, M. de Banville qui nous en avertit), ni J.-B. Rousseau dans ses détestables Allégories, ni Piron dans les couplets de ses pièces de la Foire, ni même Voltaire ! Ce rimeur, le plus indigent des rimeurs, dans ses Poésies fugitives ou dans ses lettres mêlées de vers, a parfois de longues suites de rimes difficiles et produit par l’accumulation des assonances un effet assez semblable à celui qu’obtient M. de Banville par leur qualité.

Le genre « funambulesque » est donc en grande partie ce qu’était autrefois le « burlesque ». La richesse amusante de la rime est un de leurs éléments communs. M. de Banville n’a fait qu’y joindre les procédés de versification et le vocabulaire particulier de la poésie contemporaine : encore avait-il déjà pour modèles certaines bouffonneries lyriques de Victor Hugo et surtout le quatrième acte de Ruy Blas. Le genre funambulesque, tel qu’il l’a pratiqué, c’est simplement le « burlesque » romantique, comme le burlesque serait le « funambulesque » classique.

Mais enfin, si d’autres ont aimé la rime, si d’autres l’ont rentée et lui ont appris des tours, nul n’a plus fait pour elle que M. de Banville. Il a été son amant de cœur et son protecteur en titre. Il l’a mise en valeur et magnifiquement lancée. Il en a fait une lionne riche à faire pâlir Rothschild, une gymnaste agile à décourager les Hanlon-Lee. — Sans doute il n’a point créé le genre funambulesque et ne l’a même