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encore une fois, ce qui nous fait aimer cet art si simple, ce sont des raisons qui ne le sont point, qui nous viennent de l’expérience d’un art plus tourmenté, d’une littérature plus riche, d’une sensibilité plus fine.

Et c’est pourquoi, après nous avoir dit de l’Acropole : « Il y a un lieu où la perfection existe ; il n’y en a pas deux : c’est celui-là… C’était l’idéal cristallisé en marbre Pentélique qui se montrait à moi » ; après avoir chanté (avec quelle grâce ensorcelante !) les litanies de la déesse aux yeux bleus, l’enchanteur Renan, par une diabolique palinodie, fait entendre à Pallas Athènè qu’il y a pourtant au monde autre chose que la Grèce, et qu’être antique, c’est être vieux :

… J’irai plus loin, déesse orthodoxe ; je te dirai la dépravation intime de mon cœur. Raison et bon sens ne suffisent pas. Il y a de la poésie dans le Strymon glacé et dans l’ivresse du Thrace. Il viendra des siècles où tes disciples passeront pour les disciples de l’ennui. Le monde est plus grand que tu ne crois. Si tu avais vu les neiges du pôle et les mystères du ciel austral, ton front, ô déesse toujours calme, ne serait pas si serein ; ta tête, plus large, embrasserai divers genres de beauté…[1].

  1. Renan, Souvenirs d’enfance et de jeunesse.