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la tentation et nous la voyons commencer avec la vie même de la femme : l’idée est ingénieuse. M. Grenier a été rarement mieux inspiré que dans cette belle et délicate « idylle ».

Après Milton, Eschyle. Les dieux de l’Olympe sont inquiets. Une voix a crié sur la mer : « Pan est mort ! » Prométhée seul connaît le secret des destinées. Jupiter lui envoie, pour lui arracher ce secret et en lui offrant de partager l’empire, le subtil Mercure, puis le bon Vulcain. Prométhée refuse de répondre, défie et menace. Il ne parlera que si Jupiter lui-même vient l’implorer. Jupiter consent enfin à s’humilier devant son ennemi, lui fait enlever ses fers, et Prométhée annonce alors la naissance d’un dieu nouveau qui détrônera tous les anciens dieux.

Cette « tragédie » a de la pureté, de l’élévation, de la grandeur. Il me paraît cependant que l’idée en pouvait être exprimée plus fortement. Je voudrais que le poète eût marqué par des traits plus précis, dans une analyse poussée un peu plus avant, ce que le christianisme apportait avec soi de nouveau, la différence essentielle entre le naturalisme primitif et la religion de Jésus, Prométhée représentant d’ailleurs ce qu’il y avait déjà de chrétien dans l’âme antique. Puis il y a peut-être là plus d’éloquence que de poésie. On peut dire, je crois, que dans ces grands poèmes tragiques, épiques, symboliques, l’idée génératrice se réduit presque toujours à quelque chose de fort simple, d’élémentaire, de facile à trouver. Et ils