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artiste, et qui a fait quelques-uns des plus beaux vers pittoresques de notre langue. C’est un excellent homme, d’humeur savoureuse, et d’un bon sens admirable dans des limites étroites. Si bien qu’avec lui on est toujours tranquille. Il ne trouble pas. Il suggère peu de chose au delà de ce qu’il dit. Avec cela, il a ravi ses contemporains. Savez-vous bien qu’il y a eu cent trente-trois éditions de ses différents ouvrages publiées de son vivant ? C’est extraordinaire. Et qu’il n’a jamais demandé un sou à ses libraires ? Ce n’est pas ordinaire non plus. Il était très vivant, bon compagnon, plein de verve, grand disputeur et bon plaisant. Il avait un « talent d’imitation » très remarquable, entendez le talent de contrefaire les gens. « Il amusa un jour le roi, dit Louis Racine, en contrefaisant devant lui tous les comédiens, y compris Molière. » Il était connu pour ce talent, et on l’invitait à dîner pour qu’il « fît des imitations », comme nous dirions aujourd’hui.

Mais enfin, dit Louis Racine, il en eut honte, et, ayant fait réflexion que c’était faire un personnage de baladin, il n’alla plus aux repas où on l’invitait que pour réciter ses ouvrages.

Il avait beaucoup d’esprit. La plupart des mots qu’on a conservés de lui sont excellents. Et plusieurs sont généreux et courageux.

À l’époque où nous sommes (1663-1664), il écrit ses premières satires et en fait des lectures privées. Elles ne sont pas profondes, et il s’y trouve des