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S’il y a beaucoup de simplicité et de naïveté dans ses ouvrages, il n’y en a pas eu moins dans sa vie et dans ses manières. Il n’a jamais dit que ce qu’il pensait, et il n’a jamais fait que ce qu’il a voulu faire. Il joignait à cela une humilité naturelle dont on n’a guère vu d’exemple ; car il était fort humble sans être dévot ni même régulier dans ses mœurs (oh ! non) jusqu’à la fin de sa vie.

Petit bourgeois de campagne, venu tard à Paris, n’ayant pas écrit grand’chose jusqu’à la quarantaine, son éducation s’était faite toute seule. Un jour il découvre Malherbe, un jour Marot, un jour l’Arioste, un jour Platon, un jour Rabelais, un jour le prophète Baruch ; tout cela au hasard. Il goûte notre vieille littérature gauloise, alors assez dédaignée. Il écrit des contes grivois, parce que cela l’amuse. Plus tard, il s’en repent, sans trop comprendre, parce qu’on lui a dit que ce n’était pas bien. Un jour, il rime un récit de la Légende dorée : la Captivité de saint Malc, pour faire plaisir à messieurs de Port-Royal. Il ne se pique pas d’inventer quoi que ce soit, soit paresse, ou, pour en revenir au jugement de Perrault, humilité. Il n’y a pas un de ses ouvrages dont le sujet lui appartienne. Et pourtant ses Fables semblent de ces choses qu’un seul homme pouvait écrire « par un décret nominatif de l’Éternel » .

Il se laisse vivre ; il se laisse protéger et nourrir par Fouquet, par madame de Bouillon, par madame de la Sablière, par madame Hervart, par les Vendôme (le duc et le grand prieur). Il