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personnage héroïque ; mais ces délicatesses sont de véritables faiblesses.

Ces délicatesses sont de véritables faiblesses : cet écolier de vingt ans ose enfin le dire dans ces notes sincères ; et c’est dans l’amour du grec qu’il puise cette audace. Tout, dans Homère, ravit Racine ; nulle familiarité, même nulle crudité ne le choque. Plusieurs fois, il semble préférer Homère à Virgile : « Virgile a imité cette description. Mais celle d’Homère est beaucoup plus achevée, et entre plus dans le particulier. » Il est enchanté d’entendre Nausicaa appeler Alcinoüs « son papa » ([Grec : pappa phile]) « quoiqu’elle soit grande fille » . Lorsque, chez les Phéaciens, Ulysse demande son chemin à une jeune fille qui porte une cruche d’eau :

Il ne se peut rien de plus beau, dit Racine, que la justesse et l’exactitude d’Homère. Il fait parler tous ses personnages avec une certaine propriété qui ne se trouve point ailleurs. Ulysse, par exemple, parle simplement à cette fille, et cette fille lui répond avec naïveté.

Ainsi, voilà Racine, à vingt ans, profondément épris de la bonhomie, de la franchise et du réalisme d’Homère. Vous vous demanderez : « Pourquoi, plus tard, ne s’en est-il pas souvenu davantage ? Pourquoi, lorsqu’il avait sous les yeux la fréquente familiarité du dialogue d’Euripide, a-t-il prêté au serviteur d’Agamemnon et à la nourrice de Phèdre des discours d’une