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différencier si tôt et si complètement du très illustre vieux poète.

Huit ou neuf mois après (juin 1661 ; il a vingt et un ans et demi), nous trouvons Racine occupé d’une tragédie sur les amours d’Ovide :

J’ai fait, refait, et mis enfin dans sa dernière perfection tout mon dessein (mon plan). J’y ai fait entrer tout ce que m’avait marqué mademoiselle de Beauchâteau, que j’appelle la seconde Julie d’Ovide… Avec cela, j’ai lu et marqué tous les ouvrages de mon héros, et j’ai commencé même quelques vers.

Dans cette même lettre, il parle avec une légèreté fâcheuse des tribulations de Port-Royal et de la déposition de M. Singlin, confesseur des religieuses. C’est que Port-Royal l’accablait alors secrètement de remontrances et de vitupérations. Mais c’est aussi dans cette même lettre que Jean Racine écrit :

M. l’avocat (un de leurs amis communs) me le disait encore ce matin en me remettant votre lettre : « Il faut du solide, et un honnête homme ne doit faire le métier de poète que quand il a fait un bon fondement pour sa vie, et qu’il peut se dire honnête homme à juste titre. »

Si fou qu’il soit de poésie et de théâtre, le garçon, dans le fond, est fort sensé.

Et c’est pourquoi, lorsque ses amis de Port-Royal, sa tante, ses parents de la Ferté-Milon s’entendent pour l’envoyer à Uzès, où l’appelle son oncle le chanoine Sconin, qui lui fait espérer un