Page:Lemaître - Jean Racine, 1908.djvu/47

Cette page n’a pas encore été corrigée

et de Hamon et le neveu de la mère Agnès acheva de s’émanciper quant à la règle des mœurs. Au reste, je ne prétends pas à la précision sur ce point. Tout ce que j’ai voulu établir, c’est qu’il ne se jeta pas soudainement dans la vie la plus opposée aux leçons de Port-Royal. Il y mit de la lenteur, observa des étapes, — parce qu’il avait du goût.

En attendant, il badine, il galantise, il « fait le loup », comme il dit, mais sans être un fort grand loup. C’est beaucoup moins de plaisirs qu’il est curieux et avide que de littérature, de poésie, — et de gloire. Il veut être célèbre, il veut « arriver » . Racine, à vingt ans, est un jeune « arriviste » ; mon Dieu, oui. Louis Racine, dans ses Mémoires, dira de son père : « Il avait eu, dans sa jeunesse, une passion démesurée de la gloire. » En ce temps-là, il était beaucoup plus facile qu’aujourd’hui, à un jeune homme de talent, de se faire rapidement connaître. C’est qu’aujourd’hui, vraiment, « ils sont trop » . Au temps de Racine, la proportion entre le nombre des gens occupés d’écrire et le nombre des hommes voués à d’autres travaux était encore raisonnable et normale. Cette proportion a été rompue, effroyablement. Mais alors on pouvait encore compter les écrivains. La concurrence n’était point terrible. Et, chose remarquable, on peut bien citer, au XVIIe siècle, des talents surfaits, mais, je crois, pas un talent méconnu.