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bien curieux en ce qu’il nous montre un Racine de vingt et un ans, éveillé et excité, mais, je crois bien, innocent encore malgré ses airs gaillards.

Dans cette lettre, il dit à son ami Le Vasseur qu’il vient de lire toute la Callipédie, et qu’il l’a admirée tout entière. La Callipédie ? qu’est cela ? C’est un poème latin— fort élégant— du médecin Claude Quillet, publié en 1655, sur les moyens d’avoir de beaux enfants : Callipedia, sive de pulchræ prolis habendæ ratione. Cette lecture était convenable à l’âge de Racine, et le devait intéresser par tout le scabreux d’un docte badinage et par l’ingéniosité des périphrases exprimant les détails physiologiques les plus osés. Les adolescents lisent volontiers les traités médicaux sur des sujets délicats.

Et donc, après avoir loué le latin de Quillet, Racine continue ainsi :

Vous vous fâcherez peut-être de voir tant de ratures (dans sa lettre), mais vous les devez pardonner â un homme qui sort de table. Vous savez que ce n’est pas le temps le plus propre pour concevoir les choses bien nettement, et je puis dire, avec autant de raison que M. Quillet, qu’il ne se faut pas mettre à travailler sitôt après le repas :

Nimirum crudam si ad lœta cubilia portas
Perdicem, incoctaque agitas genitalia cœna,
Heu ! tenue effundes semen…

Je ne puis vous traduire exactement ces vers. Ils reviennent à dire qu’on n’est bon à rien tant que la digestion n’est pas faite. Là-dessus, Racine fait ce commentaire :