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dont je ne leur parle jamais, je les entretiens des choses qui leur plaisent. Mon talent avec eux n’est pas de leur faire sentir que j’ai de l’esprit, mais de leur apprendre qu’ils en ont.

« Tout de l’homme modeste et, sur la fin, de l’homme de bien. » Saint-Simon aurait pu ajouter : « tout du chrétien » . Racine s’efforçait d’être humble, ce qui est, je crois, le commencement de la sainteté. Je ne sais s’il croyait vraiment les vers de Corneille « cent fois plus beaux que les siens », mais enfin il le disait. Un détail bien significatif : — En 1685, dans son éloge de Corneille, il avait écrit : « La France se souviendra… que sous le règne du plus grand de ses rois a fleuri le plus célèbre de ses poètes. » Évidemment il n’a pas encore eu le courage d’écrire « le plus grand » . Mais, en 1697, dans la réédition de son discours, il corrige bravement, et il écrit : « le plus grand de ses poètes » . Cela n’a l’air de rien, et cela est peut-être héroïque.

(Je vous signale en passant, dans la seconde partie de ce discours, sur les négociations et les manœuvres qui précédèrent la trêve de Ratisbonne, une des plus belles et des plus vivantes périodes de la prose française au XVIIe siècle.)

Les ennemis de Racine l’accusaient d’être trop bon courtisan. Et pourtant il restait publiquement l’ami des jansénistes et des religieuses de Port-Royal. Il négociait pour elles. Pour elles et dans l’espérance de leur rendre leur archevêque favorable,