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contenue, imposée par la politesse du temps et par la pudeur chrétienne ! — Boileau, envoyé par les médecins à Bourbon, écrit à Racine :

L’offre que vous me faites de venir à Bourbon est tout à fait héroïque et obligeante : mais il n’est pas nécessaire que vous veniez vous enterrer dans le plus vilain lieu du monde, et le chagrin que vous auriez infailliblement de vous y voir ne ferait qu’augmenter celui que j’ai d’y être. Vous m’êtes plus nécessaire à Paris qu’ici, et j’aime encore mieux ne vous point voir que de vous voir triste et affligé. Adieu, mon cher monsieur (13 août 1687).

Et, coïncidence touchante, le même jour (en sorte que les deux lettres se sont croisées), Racine écrivait à Boileau :

… Plus je vois décroître le nombre de mes amis, plus je deviens sensible au peu qui m’en reste. Et il me semble, à vous parler franchement, qu’il ne me reste plus que vous. Adieu. Je crains de m’attendrir follement en m’arrêtant trop sur cette réflexion.

Il serait curieux de comparer ses lettres de direction paternelle et chrétienne à son fils aîné avec les lettres élégamment cyniques de Lord Chesterfield à son bâtard. Les conseils de Racine à Jean-Baptiste sur ses lectures, sur ses divertissements, sur sa conduite dans le monde, sur les moyens d’avancer honnêtement dans sa carrière (qui était la diplomatie), offrent un mélange exquis de fermeté et de tendresse, de piété chrétienne et de sens pratique, quelquefois d’ironie indulgente. Quand il