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Racine appelle, dans Iphigénie, « une sainte horreur qui rassure », Jéhovah étant visiblement le conducteur de l’action :

Impitoyable Dieu, toi seul as tout conduit !

l’amour, sans lequel la tragédie ne se concevait pas auparavant, remplacé par des passions aussi fortes et plus grandes par leur objet ; la façon superbement simple dont les caractères sont peints, je voudrais dire « brossés » à larges traits (si bien qu’Athalie semble faite, non plus pour un étroit théâtre fermé, mais pour quelque amphithéâtre antique, en plein air) ; le naïf et imperceptiblement comique Abner ; Mathan, gonflé de la haine propre aux apostats ; la maternelle et naturelle Josabeth ; le joli petit fanatique Zacharie ; Athalie, la vieille criminelle fatiguée, devenue hésitante et presque sentimentale ; et le terrible Joad, le plus beau type d’entraîneur d’hommes, fort, enthousiaste et rusé, imaginatif (voyez sa « prophétie » ) comme les grands hommes d’action, avec un certain mépris pour la foule :

Peuple lâche en effet, et né pour l’esclavage !

mais aussi une foi indomptable en lui-même et en Dieu ; c’est-à-dire, en somme, dans la beauté de son rêve et de son œuvre : foi absolue et qui va jusqu’au sublime du sacrifice, puisque, ayant entrevu, dans son accès prophétique, le meurtre de son fils Zacharie par ce Joas qu’il est en train