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la crainte de Jupiter Capitolin… D’autres, dit-il encore, furent si touchés de voir Junie s’aller rendre religieuse de l’ordre de Vesta, qu’ils auraient nommé cet ouvrage une tragédie chrétienne si l’on ne les eût assurés que Vesta ne l’était pas.

Le vieux Corneille, avec une affectation d’impartialité, faisait des remarques doctes et relevait les anachronismes de la pièce. Il reprochait à l’auteur d’avoir fait vivre Britannicus et Narcisse deux ans de plus qu’ils n’ont vécu (lui qui, dans Héraclius, avait prolongé de douze ans le règne de Phocas). Boursault (dans l’introduction du petit roman d’Arthémise et Poliante) rapporte les sentiments des malins auprès desquels il se trouvait placé :

Agrippine leur a paru fière sans sujet, Burrhus, vertueux sans dessein, Britannicus amoureux sans jugement, Narcisse lâche sans prétexte, Junie constante sans fermeté, et Néron cruel sans malice.

Plus loin, il dit « que le premier acte promet quelque chose de fort beau et que le second ne le dément pas, mais qu’au troisième il semble que l’auteur se soit lassé de travailler, et que le quatrième ne laisserait pas de faire oublier qu’on s’est ennuyé au précédent, si, dans le cinquième, la façon dont Britannicus est empoisonné et celle dont Junie se rend vestale ne faisaient pas pitié » . Voilà la critique du temps, j’entends celle qui se faisait au théâtre même, puis dans les feuilles. Il lui arrivait d’être aussi peu définitive que celle d’aujourd’hui.