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ni escargots de Phlionte, ni murènes, ni coquillages du lac Lucrin.

Elle était bien singulière, cette « couleur locale » des romantiques. Je pourrais vous parler de la « couleur locale » espagnole de Ruy-Blas ou de la « couleur locale » Renaissance de Henri III et sa Cour. Mais, puisqu’il s’agit de la Rome impériale, je préfère emprunter à un consciencieux élève de Hugo et de Dumas un petit morceau d’un drame romain. Le jeune Caligula raconte à son oncle Tibère comment il passait son temps à Rome :

J’allais tous les jours à la porte Capène, ce rendez-vous élégant de l’opulence et de la noblesse romaine ; c’est un coup d’œil fort brillant… Des sénateurs, drapés de pourpre, se promènent en litière… ; dans les lourdes rhédas, attelées de mules couvertes de lames d’or et de pierres précieuses, sont étendues les matrones voilées ; et avec elles se croise le léger cisium où la courtisane grecque, vêtue de robes splendides, conduit elle-même ses amants.

Réfléchissez que c’est exactement comme si, chez nous, dans le courant de la conversation, quelqu’un se mettait à dire :

J’allais tous les jours au Bois de Boulogne, ce rendez-vous élégant de l’opulence parisienne ; c’est un coup d’œil fort brillant. Des messieurs en jaquette ou en veston se promènent dans leur automobile ; des hommes de sport conduisent leur mail…

Et ainsi de suite…

Eh bien, c’est ça, la « couleur locale » dans