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plaisir d’étendre son être en faisant souffrir, les sensations agréables ayant pour mesure la souffrance d’autrui, et le désir de sentir se confondant avec le désir de détruire…

Et ce sont ces plaisirs et ces pleurs que j’envie…
Caché près de ces lieux, je vous verrai, madame…
Je me fais de sa peine une image charmante…

Et, après ces ironies et ces méchancetés froides, l’explosion de colère sous les mots dont le flagelle Britannicus, la menace d’arrêter tout le monde, et, dès lors, l’assassinat secrètement résolu ; puis, le petit attendrissement devant les larmes et l’agenouillement de ce brave Burrhus ; mais enfin, sous l’habile manœuvre de Narcisse, qui, tour à tour, chatouille la vanité de l’homme, l’orgueil du tout-puissant et son besoin de mépriser et, point plus sensible encore, son amour-propre de cocher et de chanteur, — Néron redevenant lui-même et de nouveau consentant au crime.


Oui, tout ce développement de deux âmes brillamment perverses, — Agrippine et Néron, — est très fort et très beau. Mais le plus beau est encore leur rencontre au quatrième acte, la confession de la mère au fils. Car, cette confession d’une audace étrange, Agrippine l’imagine pour arrêter Néron dans la voie criminelle ; et il est clair qu’elle ne peut (après réflexion) que l’y précipiter.

Dans ce récit, qui est un pur chef-d’œuvre par la teneur, la contexture, la progression, par la concision