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jouit. Elle éclate d’orgueil et d’arrogance. Elle a la niaiserie d’exiger, avant tout, des égards. Ce qu’il lui faut, c’est que Néron donne pour « mot d’ordre » aux prétoriens : « la meilleure des mères », c’est de s’asseoir à côté de lui sur le trône et de recevoir avec lui les ambassadeurs. C’est de croire qu’elle préside le Sénat, derrière son rideau, et de s’y laisser deviner. Elle pousse des cris d’aigle quand Néron lui enlève sa garde germanique. Peut-être en s’effaçant eût-elle continué à gouverner son fils. Mais sa rage de présider et de paraître l’emporte. Le pouvoir, pour elle, c’était le diadème, et des licteurs, et des statues dans les temples.

À mesure que son influence décroît, sa prudence diminue. Elle qui fut si constante et si suivie dans ses desseins, elle s’abandonne à de turbulentes contradictions. Lorsque Néron prend pour maîtresse la bonne Acté (je dis la bonne Acté parce que les historiens la soupçonnent d’avoir été quelque peu chrétienne), Agrippine jette d’abord les hauts cris. Mais, peu après, elle offre à Néron son propre appartement « pour cacher des plaisirs dont un si jeune âge et une si haute fortune ne sauraient se passer », et elle lui donne de l’argent tant qu’il en veut. Une autre fois, la complaisance ne lui ayant pas mieux réussi que la rigueur, elle éclate en colères de femme, en folles et stupides bravades. Elle crie « avec des gestes de forcenée » que Britannicus n’est plus un enfant, que c’est lui le légitime héritier