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était doué pour la poésie, non pour le théâtre. C’est un de ces jugements qui ne se pardonnent pas. Et les premiers succès d’un jeune rival ne sont pas non plus faciles à pardonner. Corneille et Racine se sont cordialement détestés, voilà le fait. Nous y reviendrons.

Boileau fut sublime d’amitié. Bien des choses devaient lui déplaire dans Alexandre. Il était alors en train d’écrire son Dialogue sur les héros de romans. À coup sûr, le héros de Racine devait lui paraître amoureux hors de propos. Mais Boileau aimait Racine. Et alors, dans sa satire du Repas ridicule qu’il écrivit cette année même, il fit dire au sot campagnard :

Je ne sais pas pourquoi l’on vante l’Alexandre, Ce n’est qu’un glorieux qui ne dit rien de tendre. Les héros chez Quinault parlent bien autrement.

Comme si, en effet, le défaut du héros de Racine était la rudesse ! L’excellent Boileau, qui ne le croyait pas, voulait le faire croire ; et cela est admirable.

Donc, tout réussissait à Racine. À vingt-cinq ans il entrait dans la renommée. Il y entrait avec insolence, comme on pourra le voir par la première préface de sa tragédie (1666). Et c’est à ce moment-là que, grisé par sa jeune gloire, il commet une action fâcheuse, puis une très mauvaise action.

Voici l’action fâcheuse. Racine trouva que l’Alexandre était fort mal joué, au Palais-Royal,