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gourdi de songes, — le solitaire orgueilleux, l’autodidacte outrecuidant, l’indiscipliné, le révolutionnaire par instinct, l’insociable qui réforme tous les jours la société, l’homme qui date tout de lui, qui ramène tout à lui et subordonne tout à son rêve ou à son caprice ; qui fait à chaque instant table rase de toute l’œuvre humaine, et qui croit faire avancer les hommes en rompant la continuité entre les générations ; l’homme qui peut bien faire complices de ses imaginations les anthropoïdes ou les Spartiates, mais qui, en réalité, ne tient nul compte des morts de sa race, « plus nombreux que les vivants » ; — bref, exactement le contraire d’un Bossuet ou d’un Auguste Comte.

J’ai adoré le romantisme, et j’ai cru à la Révolution. Et maintenant je songe avec inquiétude que l’homme qui, non tout seul assurément, mais plus que personne, je crois, se trouve avoir fait chez nous ou préparé la révolution et le romantisme, fut un étranger, un perpétuel malade, et finalement un fou.

Mais on l’a aimé. Et beaucoup l’aiment encore ; les uns, parce qu’il est un maître d’illusions et un apôtre de l’absurde ; les autres, parce qu’il fut, entre les écrivains illustres, une créature de nerfs, de faiblesse, de passion, de péché, de douleur et de rêve. Et moi-même, après cette longue fréquentation dont j’ai tiré plus d’un plaisir, je veux le quitter sans haine pour sa personne, — avec la plus vive réprobation pour quelques-unes de ses