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hommes, et même ceux qui les déprisent ; faites en sorte qu’il ne se place dans aucune classe, mais qu’il se retrouve dans toutes ; parlez-lui du genre humain avec attendrissement, avec pitié même, mais jamais avec mépris. Homme, ne déshonore point l’homme.

Cependant, le moment est venu de faire connaître les hommes à Émile : d’abord par l’histoire, et surtout par Plutarque.

Et le moment est venu aussi de lui faire connaître Dieu. C’est ici que son gouverneur lui rapporte la Profession de foi du Vicaire Savoyard.

Ici, le gouverneur enseigne enfin, il n’y a pas à dire… Jamais Émile, livré à la seule nature, n’aurait trouvé de lui-même une si belle démonstration d’un Dieu personnel, de l’immortalité de l’âme et de la vie future. Alors, pourquoi ne lui avoir pas enseigné cela plutôt ? cela, et quelques autres choses bonnes à connaître ? Que de temps de gagné !

Rousseau répond :

A quinze ans, Émile ne savait point s’il avait une âme, et peut-être à dix-huit ans n’est-il pas encore temps qu’il l’apprenne. En tout cas, si on lui avait dit ces choses-là plus tôt, il ne les aurait pas comprises.

Qui sait ? Il en aurait compris ce qu’il aurait pu. Le même Rousseau écrit au livre II des Confessions :

Quand j’ai dit qu’il ne fallait point parler aux enfants de religion si l’on voulait qu’un jour ils en eussent, et qu’ils étaient incapables de connaître Dieu, même à notre manière, j’ai tiré mon sentiment de mes observa-