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posture qui vous fit honneur, était contradictoire à la vraie bonté qui suppose justement l’oubli de soi ou du moins l’effort de s’oublier. Et c’est pourquoi leur « sensibilité » n’empêcha nullement les hommes de la Révolution d’être sans pitié. — Puis, cette sensibilité étant une mode et, par suite, étant affectée par les êtres les plus médiocres, avait rapidement revêtu une forme d’une exprimable sottise. — Et enfin, comme cette sensibilité passait pour noble, elle entraîna la « noblesse du style », telle que la concevaient les sots, c’est-à-dire la plus emphatique et la plus niaise phraséologie, un charabia sans nom. Par là, quelques-uns des écrivains de la seconde moitié du XVIIIe siècle nous paraissent plus éloignés de nous, plus étrangers, plus iroquois que les « précieux » ou les « burlesques » du XVIIe siècle ou les pédants du XVIe. Lisez un peu, pour voir, le théâtre de Sébastien Mercier, ou la correspondance amoureuse ou même familiale de certains Conventionnels, et certains romans oubliés du temps de la Terreur. — Rousseau n’a pas seulement légué à la Révolution son vocabulaire politique, ses fêtes et sa conception de l’État : il lui a transmis le style bête.

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Voilà donc terminée la première période des amours du maître d’étude et de la jeune fille noble. Cela est glacial (Jean-Jacques ne l’ayant écrit qu’avec sa tête, et d’après l’amour artificiel, livresque et voulu qu’il avait conçu pour madame