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j’avais le cœur si ému, que je ne pus dire un seul mot. Je suivais par derrière, pleurant comme un enfant, et mourant d’envie de baiser les pas de ce bon maréchal. » Cela est d’un bon cœur ; mais c’est trop, décidément, c’est trop.

Quant à la maréchale, vous la connaissez. Besenval, parlant du temps où elle était duchesse de Boufflers, nous la peint comme un monstre de débauche, d’ivrognerie et de méchanceté. Vous en penserez ce que vous voudrez. Et il est vrai que Besenval ajoute : « Je ne lui connais qu’un seul mérite, c’est la manière dont elle a élevé la duchesse de Lauzun sa petite-fille… On ne peut disconvenir qu’elle ne soit un chef-d’œuvre d’éducation et la femme la plus parfaite qu’on ait connue. » (Quant au maréchal, Besenval nous le donne pour un homme extrêmement « borné »).

La maréchale avait cinquante et un ans quand Rousseau entra dans sa quasi-intimité. Elle avait eu publiquement le maréchal pour amant avant de l’avoir pour mari. Elle était encore belle, très spirituelle, et d’un esprit mordant, mais qui commençait à s’adoucir. Après la mort du maréchal (1764) elle devint, paraît-il, tout à fait bonne, d’une bonté faite d’une longue expérience. Sous Louis XVI, elle fut considérée comme l’oracle du bon ton et de l’urbanité, comme celle qui maintenait les règles de la « parfaitement bonne compagnie ». — « Le genre de madame Geoffrin était une espèce de police pour le goût, comme la maré-