Page:Lemaître - Chateaubriand, 1912.djvu/86

Cette page n’a pas encore été corrigée

du Canada, il est allé à Paris, puis à Versailles pour être présenté au roi Louis XIV.

Et ainsi, de descriptions du monde invisible qui rappelaient le Paradis perdu et la Messiade et qui appartenaient au « genre sublime », nous passons à une sorte de conte philosophique et à quelque chose qui n’est pas extrêmement différent de l’Ingénu de Voltaire, — pour revenir ensuite à une manière d’épopée, qui n’est vraiment pas le contraire des Incas de Marmontel.

Le voyage de Chactas en France est agréable. Chactas, qui avait déjà appris le français chez les Iroquois, a eu tout le temps de se perfectionner au bagne : il est donc assez invraisemblable de l’entendre appeler un carrosse une « hutte roulante », le cocher « guide du traîneau », Paris le « grand village », une église la « cabane des prières », etc… Mais cela est amusant. Et la venue de Chactas à Paris et à Versailles n’est point une invention absurde : car nous savons que, sans compter le doge de Gênes, les Turcs et l’ambassade siamoise, on montrait souvent des « curiosités » à la cour de Louis XIV.

Une bonne partie du rôle de Chactas rappelle celui du Huron par la constatation étonnée de tout ce qui, à Paris et à Versailles, dans les lois et dans les mœurs, s’éloigne de la raison, de la justice, et de la nature. Même, Chactas a peut-être plus de verdeur dans la naïveté et un accent plus « révolutionnaire » que le Huron. La présentation de Chactas