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cela le mène à ces conclusions :

 Déjà nous possédons cette importante vérité, que l’homme,
 faible dans ses moyens et dans son génie, ne fait que se
 répéter sans cesse ; qu’il circule dans un cercle, dont
 il tâche en vain de sortir… — Il s’ensuit qu’un homme bien
 persuadé qu’il n’y a rien de nouveau en histoire perd le goût
 des innovations, goût que je regarde comme un des plus grands
 fléaux qui affligent l’Europe en ce moment.

Et alors le flot d’amertume se précipite : Liberté ! le grand mot ! et qu’est-ce que la liberté politique ? Je vais vous l’expliquer. Un homme libre à Sparte veut dire un homme dont les heures sont réglées comme celles de l’écolier sous la férule, etc. « On s’écrie : Les citoyens sont esclaves, mais esclaves de la loi. Pure duperie de mots. Que m’importe que ce soit la loi ou le roi qui me traîne à la guillotine ? On a beau se torturer, faire des phrases et du bel esprit, le plus grand malheur des hommes, c’est d’avoir des lois et un gouvernement. »

Enfin :

 Soyons hommes, c’est-à-dire libres ; apprenons à mépriser les
 préjugés de la naissance et des richesses, à nous élever
 au-dessus des grands et des rois, à honorer l’indigence et la
 vertu ; donnons de l’énergie à notre âme, de l’élévation à
 notre pensée ; portons partout la dignité de notre caractère,
 dans le bonheur et dans l’infortune ; sachons braver la pauvreté
 et sourire à la mort ; mais pour faire tout cela, il faut
 commencer par cesser de nous passionner pour les institutions
 humaines, de quelque genre qu’elles soient. Nous n’apercevons