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la connut à Rome, en 1829 (il avait soixante et un ans). Voici ce qu’elle raconte (et vous en croirez ce que vous voudrez) : « Je lui écrivis un petit mot, auquel il répondit tout de suite, et j’allai chez lui le lendemain. Il me reçut avec coquetterie et se montra charmant et charmé. » Quelques jours plus tard : «… Il me rapporta mon manuscrit en me disant que j’avais du génie, que c’était admirable. Que ne dit-il point ?… Je savais déjà qu’un homme trouve du génie à la femme dont il est amoureux. Je crois le voir encore dans ce salon… Ce fut pourtant rapide et ridicule. Pouvait-il s’éprendre si vite ? Et moi, devais-je le croire sincère ? Pourquoi si peu de réflexion de mon côté ?… M. de Chateaubriand, avec moi, jouait un peu la comédie, et je m’en apercevais bien. Il avait d’ailleurs un entraînement véritable » (qu’entend-elle par là ?) « car il aimait beaucoup les femmes. Il venait chez moi une fleur à la boutonnière, très élégamment mis, d’un soin exquis dans sa personne ; son sourire était charmant, ses dents étaient éblouissantes, il était léger, semblait heureux : déjà on parlait dans Rome de sa gaieté nouvelle ».

Hortense lui reproche sa guerre d’Espagne. Il s’explique gentiment. « Il avait, dit Hortense, un esprit si vaste, si tolérant… qu’excepté sur la religion catholique on pouvait toujours s’entendre avec lui. » Il rentre à Paris, elle l’y rejoint. Il la voit tous les jours. « Chateaubriand restait chez moi tous les jours deux ou trois heures de suite ; il