par l’intelligence, qu’un Talleyrand a pu l’emporter, comme diplomate, sur l’auteur d’Atala. Chateaubriand devrait donc s’en consoler : mais il ne s’en console pas, parce qu’il voudrait avoir été tout et qu’il désire toutes les formes de la gloire.
Cette vanité monstrueuse semble bien marquer, chez un homme qui a tant rêvé, un manque étrange de vie intérieure, de réflexion sur soi. C’est que la rêverie n’est point la réflexion ni la méditation. Chateaubriand est un grand inventeur de sensations et d’images ; mais aussi il est en proie aux images et aux sensations. Il est à remarquer que ceux qui ont trouvé beaucoup d’images s’en savent meilleur gré, cèdent plus facilement à la vanité, que ceux qui ont trouvé beaucoup de pensées. Ceux-ci (les hommes du type de Descartes, si vous voulez) ou sont assez aisément modestes, ou bien ont l’orgueil farouchement silencieux. Ceux-là, au contraire, ne concevant la gloire que présente, tangible, concrète, sont séduits par elle comme par une image plus belle que les autres, et à laquelle ils s’attachent violemment. C’est un grand écueil pour la modestie et pour le bon sens que d’être celui qui a le don de faire plus de métaphores que ses contemporains.
C’est égal, il est vraiment désobligeant de voir un homme d’un si grand génie si constamment préoccupé de ce qu’il paraît aux yeux des autres hommes, si entêté d’être toujours le plus beau, le