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d’Espagne, et que la guerre d’Espagne est une sorte de prodige historique. Il écrira ingénuement : « Nous pouvions nous avouer qu’en politique nous valions autant qu’en littérature, si nous valons quelque chose. » Il est possible : mais, en réalité, son rôle est de second plan, soit que l’occasion lui ait manqué, soit par la faute de son caractère. Ce caractère est curieux. Deux choses (au moins) sont admirables dans sa vie politique : la faculté qu’il a d’amplifier merveilleusement ce qui le touche, et la maussaderie superbe de son dévouement à la cause royale, le dédain sublime dont il accable le trône en le défendant.

Son premier écrit politique est le pamphlet : De Buonaparte et des Bourbons. Il le rédigea un peu avant l’entrée des Alliés. Napoléon avait fait la seule chose qu’il ne devait pas faire : il s’était laissé battre. La France n’en pouvait plus. La solution la plus naturelle semblait la restauration des Bourbons, peu connus, peu désirés, mais qui étaient là, tout prêts.

À ce moment, Chateaubriand hait furieusement l’homme qui l’a si longtemps empêché de vivre pleinement sa vie. Il exécute la danse du scalp, la danse de Chactas autour du poteau de guerre. Par exemple : « Il semble que cet ennemi de tout s’attachât à détruire la France par ses fondements. Il a plus corrompu les hommes, plus fait de mal au genre humain dans le court espace de dix années que tous les tyrans de Rome ensemble, depuis