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l’Enfer, etc. Il s’excite beaucoup sur les anges (dont il abusera pour son compte) : ange de la solitude, du matin, de la nuit, du silence, du mystère, des mers, des tempêtes, du temps, de la mort, des saintes amours, des rêveries du cœur. (Pan, Silène, Galatée sont plus vivants.) Il me paraît avoir un faible étrange pour le Paradis perdu de Milton. À la Vénus qui se montre à Énée dans les bois de Carthage (« Elle avait l’air et le visage d’une vierge, et elle était armée à la manière d’une fille de Sparte »), il préfère le séraphin Raphaël qui va visiter Adam et qui, « pour ombrager ses formes divines, porte six ailes ». — « Ici, dit-il, Raphaël est plus beau que Vénus. » Avec ses trois paires d’ailes ? Eh bien, non, non ! et il le sait bien.

Il préfère le merveilleux glacial de Milton au merveilleux d’Homère, qui est du moins amusant et bonhomme. Il doute de la vérité du précepte de Boileau :

 De la foi d’un chrétien les mystères terribles
 D’ornements égayés ne sont point susceptibles,

qui est pourtant le bon sens même. Car on ne voit pas quels « ornements égayés » pourraient recevoir le mystère de la Trinité ou celui de la Rédemption. Et ce qu’il y aura d’agréable dans ce « merveilleux » chrétien, ce sera toujours quelque chose d’analogue au « merveilleux » païen ; ce sera Eloa, la jeune ange romanesque, ou ce beau jeune