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chrétienne, condition et commencement de la reconstruction sociale ; que cela était « dans l’air » ; que, Rivarol étant trop peu croyant et ayant trop d’esprit, Bonald manquant de charme, Maistre étant étranger et ayant un génie trop insolent, Chateaubriand était le seul qui pût écrire ce livre attendu, de telle façon qu’il fût à la fois splendide, populaire et efficace… il était presque nécessaire que Chateaubriand écrivît le Génie du christianisme.

Il l’écrivit donc. Il le commença dès les premiers jours de 1799 (d’après Biré) et fit imprimer une partie du premier volume chez les Dulau, « qui s’étaient faits libraires du clergé français émigré ».

(Chateaubriand nous dit dans les Mémoires que le simiesque abbé Delille entendit la lecture de quelques fragments de l’ouvrage. L’abbé lui-même, dans son poème de la Pitié, qu’il avait composé à Brunswick un peu auparavant, célébrait la pitié chrétienne, disait la charité des sœurs grises et de l’abbé Carron ; et c’était déjà, au deuxième chant, comme une pâle petite esquisse des derniers chapitres du Génie du christianisme ; tant tout le monde avait la même chose dans l’esprit !)

Cependant, Bonaparte était devenu premier consul. Beaucoup d’émigrés rentraient. Chateaubriand quitta Londres au printemps de 1900. Il emportait avec lui Atala, René et les premières feuilles imprimées du Génie du christianisme. Il n’avait pas vu Paris depuis neuf ans. Il rentra à