Page:Lemaître - Chateaubriand, 1912.djvu/149

Cette page n’a pas encore été corrigée

le monde, après la grande orgie d’impiété, de sottise, de cruauté et de destruction, portait en soi le Génie du christianisme, en attendant qu’un seul l’écrivît.

Et quelques-uns en écrivaient déjà des fragments. La Harpe, converti comme Chateaubriand, entreprenait une Apologie de la religion. Ballanche écrivait, en 1797, le livre Du sentiment considéré dans ses rapports avec la littérature et les arts, que Chateaubriand n’a sans doute pas lu, mais où se trouve pourtant le titre même de son livre : « (À propos du Télémaque). Combien de choses, et ce sont les plus belles, qui n’ont pu être inspirées que par le génie du christianisme ! » (Cité par V. Giraud.) Un certain Paul Didier faisait paraître en 1802 un livre intitulé Du retour à la religion. Rivarol, incrédule, mais clairvoyant, écrivait dans le Discours préliminaire de son Nouveau Dictionnaire de la langue française : « Il me faut, comme à l’univers, un Dieu qui me sauve du chaos et de l’anarchie de mes idées… Le vice radical de la philosophie, c’est de ne pas pouvoir parler au cœur. Or… le cœur est tout… Tout État, si j’ose le dire, est un vaisseau mystérieux qui a ses ancres dans le ciel. » (Cité par V. Giraud.) Bonald, dans sa Théorie du pouvoir (1796), expliquait que le salut de la France était dans le retour aux principes monarchiques et surtout catholiques. Enfin, Joseph de Maistre avait publié, en 1796, ses profondes et magnifiques Considérations sur la France, que Chateaubriand