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tout est vanité, que tout a été fait de poussière et retourne à la poussière ; que celui qui augmente sa science augmente sa douleur ; qu’il a trouvé plus amère que la mort la femme, dont le cœur est un piège et un filet, et dont les mains sont des liens ; que les morts sont plus heureux que les vivants, et plus heureux que les uns et les autres, celui qui n’a pas encore existé et qui n’a pas vu les mauvaises actions qui se commettent sous le soleil.

Puis, quelque chose qui ne se confond point avec la tristesse : l’ennui ; c’est-à-dire le sentiment de l’inutilité de nos désirs à cause du néant de leur objet ; donc, en même temps que l’impossibilité de ne pas désirer, le détachement anticipé de son désir, et, par suite, avec l’incapacité d’agir, l’inquiétude et à la fois le vide du cœur.

Cela est très vieux. Cela est notamment dans Sénèque (De tranquillitate animi). Pour échapper aux agitations et aux déceptions, Sérénus s’est jeté dans la retraite et dans la solitude. Il y retrouve l’inquiétude et l’ennui, (tædium, fastidium…) « cet ennui, ce mécontentement de soi-même, cette agitation d’une âme qui ne peut se reposer, la tristesse et l’impatience de son inaction…, la mélancolie, la langueur (mœror marcorque), et les mille fluctuations d’une âme indécise…, l’irritation d’une âme qui maudit le sort, se plaint du siècle, s’enfonce dans les coins, cuve sa peine, parce qu’elle s’ennuie et qu’elle est excédée d’elle-même. »

Enfin : «