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à la

 mort ! Que la voûte du ciel nous cache en tombant sur nous !

Et surtout ceci :

… Si enfin, Céluta, je dois mourir, vous pourrez chercher
 après moi l’union d’une âme plus égale que la mienne.
 Toutefois, ne croyez pas désormais recevoir impunément
 les caresses d’un autre homme ; ne croyez pas que de faibles
 embrassements puissent effacer de votre âme ceux de René. Je
 vous ai tenue sur ma poitrine au milieu du désert, dans les vents
 de l’orage, lorsqu’après vous avoir portée de l’autre côté
 d’un torrent, j’aurais voulu vous poignarder pour fixer le bonheur
 dans votre sein, et pour me punir de vous avoir donné ce bonheur.
 C’est toi, Être suprême, source d’amour et de beauté, c’est
 toi seul qui me créas tel que je suis, et toi seul me peux
 comprendre ! Oh ! que ne me suis-je précipité dans les cataractes
 au milieu des ondes écumantes ! Je serais rentré dans le sein de
 la nature avec toute mon énergie.
 Oui, Céluta, si vous me perdez, vous resterez veuve : qui pourrait
 vous environner de cette flamme que je porte avec moi, même
 en n’aimant pas ? Ces solitudes que je rendais brûlantes
 vous paraîtraient glacées auprès d’un autre époux. Que
 chercheriez-vous dans les bois et sous les ombrages ? Il n’est plus
 pour vous d’illusions, d’enivrement, de délire : je t’ai tout
 ravi en te donnant tout, ou plutôt en ne te donnant rien, car une
 plaie incurable était au fond de mon âme. Ne crois pas, Céluta,
 qu’une femme à laquelle on a fait des aveux aussi cruels, pour
 laquelle on a formé des souhaits aussi odieux que les miens, ne
 crois pas que cette femme oublie jamais l’homme qui l’aima de cet
 amour ou de cette haine extraordinaire.
 Je m’ennuie de la vie ; l’ennui m’a toujours dévoré : ce