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et de Lucile. Il s’est donné le plaisir singulier de raconter cette aventure de leur âme (où il est vrai que, de son vivant, personne, excepté peut-être leurs amis intimes, ne les pouvait reconnaître) ; et, chose plus extraordinaire, il a voulu nous apprendre, après sa mort, que cette aventure était bien la sienne et celle de sa sœur.

Quelques-unes des premières pages de René sont très exactement autobiographiques ; et presque tout René a été repris et développé dans les Mémoires (1re partie, 3e livre). Ce troisième livre fait même paraître René assez pauvre.

Il ne veut pas que ceux qui liront un jour les Mémoires s’y puissent tromper. (Toute sa vie, dans plusieurs de ses écrits et dans sa correspondance, il affectera de s’identifier avec le héros de la nouvelle de René et du roman des Natchez. Il dit dans René : « Livré de bonne heure à des mains étrangères, je fus élevé loin du toit paternel. » « Chaque automne, je revenais au château paternel, situé au milieu des forêts, près d’un lac, dans une province reculée. » Et c’est Combourg, sauf le « lac » mis au lieu de l’étang. « Timide et contraint devant mon père, je ne trouvais l’aise et le contentement qu’auprès de ma sœur Amélie. Une douce conformité d’humeur et de goûts m’unissait étroitement à cette sœur ; elle était un peu plus âgée que moi. » Comme dans les Mémoires. Le bruit des feuilles séchées sous les pas se retrouve dans les deux récits ; « l’étang désert où le jonc flétri murmurait » (