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Beuve, dans Chateaubriand et son groupe, consacre quatre leçons entières à Atala. Il la rapproche de Paul et Virginie ; il la rapproche de Théocrite. Il compare les manières de Jean-Jacques, de Saint-Pierre, de Chateaubriand et de Lamartine ; il compare les funérailles d’Atala et celles de Manon Lescaut. Il critique la critique de l’abbé Morellet, etc… Bref, il ne nous laisse pas grand’chose à dire… Mais qu’importe, s’il nous laisse quelque chose à sentir ?

Rappelons d’abord la fable, cela est nécessaire.

Le récit est fait à René par le vieux Chactas des Natchez. Chactas raconte la grande aventure de sa jeunesse quand il ne comptait encore que « dix-sept chutes de feuilles ». Son père, le guerrier Outalissi, de la nation des Natchez, alliée aux Espagnols, l’a emmené à la guerre contre les Muscogulges, autre nation puissante des Florides. Outalissi étant mort dans le combat, un vieil Espagnol, Lopez, de la ville de Saint-Augustin, adopte le jeune Chactas et essaye de l’initier à la vie civilisée. Mais, au bout de « trente lunes », Chactas s’ennuie et ne peut plus rester. Un matin il remet ses habits de sauvage et déclare à Lopez qu’il veut reprendre sa vie de chasseur. Il part, s’égare dans les bois, est pris par un parti de Muscogulges et de Siminoles : il confesse hardiment son origine et sa nation : « Je m’appelle Chactas, fils d’Outalissi, fils de Miscou, qui ont enlevé plus de cent chevelures aux héros muscogulges. » Le chef, nommé