Page:Leibniz - Opera philosophica, ed. Erdmann, 1840.djvu/805

Cette page n’a pas encore été corrigée

XCIX. LETTRES ENTRE LEIBNIZ ET CLARKE.

7G3

d’hnracnr a sc paycr tlo raison, et h donner des nwrques de raniour dc la verite, ou si l’on ne fera quc cliioanor sans rion eolaircir.

2. On sVfforce souvent de ni"iniputer la Neces- site et la Fatalite, quoique peut-etre personnc n^ait niienx explique et plus a fond que j"ai fait dans la Theodioee, la veritable differencc entre Liberte, Contingence, Spontaneite, d*uu oote, et Necossite absolue, Ha/ard, Coaction, dc Tautre. Je ne sais pas euoore si on lo fait parce qu’on le veut, quoique jc puisse dire, ou si ces iniputations viennent de bonne foi, de ce qu’on n’a point eu- oorc pese mes sontimens. J’experimeutrai bien- tot ce que jVn dois juger, et je me regierai la- dessus.

3. II est vrai que los raisons font dans Tesprit du Sage, et les motifs dans quelque esprit que ce soit, ce qui repond a Teffet que les poids fout dans une balance" On objecte, que cette notioa mene a la necessite et a la Fatalite. Mais on le dit sans le prouver, et sans prendre connoissance des explications que j’ai dounees autrefois pour lever toutes les difficultes qu’ou peut faire la-dessus.

4. II semble aussi, qu’ou se joue d"equivoque. II y a des Neccssites, qu"il fmt admettre. Car il faut distinguer cntre unc Necessite absolue et une Necessite hypothetique. II faut di- stinguer aussi entre une Necessite qui a lieu, parce que Toppose implique oontradiction, et la- quelle est appelee Logique, Metaphy sique, ou Mathemat ique ; et entre une Necessite qui est Morale, qui fait que le Sage choisit le meilleur, et que tout esprit suit rinolination la j^Ius grande.

5. La Necessite hypothetique est celle, que la supposition, ou hypothese de la previsiou de Dieu, impose aux futurs contingens. Et il faut Fadmettre, si ce n^est qu^avec les Sociniens on re- fuse a Dieu la prescience des contingens futurs , et la Providence qui regle et gouverne les choses en detail.

6. Mais ni cette prescience ni cette preordina-

Ecrit, et con^iis en ces termes : Les differentes ie^ons, impriniees a la marge de rEcrit sui- vant, sont des changemens faits de la propre main de Mr. Leibniz dans iine autre copie de cet Ecrit, laquelle il envova a ii u de ses amis en Angleterre peii de tems avant sa mort. Mais dans cette edition on a insere ces Additioiis et Corrections dans le Texte, et par- la on a reiidu ce cinquieme Ecrit coiiforme au manuscrit original, que Mr. Leibniz avoit envoye a Mr. Des Maizeaux. — Nota editoris Gallici (l)es Maizeaux).

tion nc derogent point h la liborte. Car Dieu, porte par la suprome Kaison h ohoisir entre plu- sieurs suites dos ohoses ou Mondes possibles , celui oii les creatures libres prcndroient telles ou telles resolutions, quoique non sans son conoours, a rendu par-la tout evenement certaiu et detormine unc fois pour toutes, sans deroger par-la a la li- berte de oe oreaturesj ce simple deoret du clioix, ue changeant point, mais actualisaut seulement leurs naturos qu^il y voyoit dans ses idees.

7. Et quant a la necessite morale, elle uc de- roge point noii jdus a la liberte. Car lorstjue le Sage, et sur-tout Dieu (le Sage Souverain) choisit le meilleur, il u’cn est pas moins libre ; au con- traire, c^est la plus parfaite liberte, de n’etrc point empeohe d’agir le mieux. Et lorsqu^un autie choi- sit selou le bien le plus apj)arent, et le pkis incli- nant, il imitc en cela la liberte du Sage a propor- tion de sa dispositiou ; ct saus cela, le choix seroit un hazard avcugle.

8. Mais le bicn, tant vrai qu"apparent, en un mot le motif, incline saus uecessite, c’est-a-dire, sans imposer une necessite absolue. Car lorsque Dieu, par exemjjle, choisit le meilleur, ce qu"il ne choisit point, et qui est inferieur en pcrfection, ne laisse pas d"etre possible. Mais si ce que Dieu choisit , etoit absolumejit nocessaire, tout autre parti seroit impossible, contre rHypothese, car Diou choisit parmi les possibles, c’est-a-dire, parmi plusieurs partis, dont pas un n"iniplique coutra- diction.

9. Mais de dire que Dieu ne jiout choisir que le meillour, et d’en vouloir iuferer que ce qu’il ne choisit point, est imjjossible, c’est confondre Ics termes, la Puissance et la Volonte, laNeces- site Metaphysique et la Necessite Morale, les Essences et les Existences. Car ce qui est necessaire, Test jjar son essence, puisque Top- pose implique contradiction ; uiais le contingent qui existe, doit sou existence au principe du meil- leur, raisou suffisante des ciioses. Et c’est pour cela que je dis, que les motifs inclinent sans neces- siter et qu"il y a une certitude et infidllibilite, mais non jias une necessite absolue dans los choses contigcntos. Joignez a ceci, ce qui ce dira plus bas, Num. 73. et 76.

10. Et j"ai assez montre dans ma Theodicee, que cette necessite morale est heureuse, conforme a la jjorfection Divine, conforme au grand j)rincij)e des existences, qui est celui du besoin dune raison suffisaute ; au lieu que la necessite absolue et me- taj)hysique depcnd de rautre grand jirincipe de nos raisonnemens, qui ost celui des cssences ; c"cst-