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qu’elle en a six aussi par le même principe d’addition. Mais il faut savoir que la forme logique ne nous oblige pas à cet ordre des propositions dont on se sert communément, et je suis de votre opinion, monsieur, que cet autre arrangement vaut mieux : tout A estB, tout B est C, donc tout A est C, ce qui serait particulièrement par les sorites, qui sont un tissu de tels syllogismes. Car il y en avait encore un : tout A est C, tout C est D, donc tout A est D. On peut faire un tissu de ces deux syllogismes, qui évite la répétition en disant : tout A est B, tout B est C, tout C est D, donc tout A est D, où l’on voit que la pro- position inutile tout A est C est négligée, et la répétition inutile de cette même proposition que les deux syllogismes demandaient est évitée ; car cette proposition est inutile désormais, et le tissu est un argument parfait et bon en forme sans cette même proposition quand la force du tissu a été démontrée une fois pour toutes par le moyen de ces deux syllogismes. 11 y a une infinité d’autres tissus plus composés, non seulement parce qu’un plus grand nombre de syllogismes simples y entre, mais encore parce que les syllogismes ingrédients sont plus différents entre eux ; car on y peut faire entrer non seulement des catégoriques simples, mais encore des copulatifs, et non seulement des catégoriques, mais encore des hypothétiques ; et non seulement des syllogismes pleins, mais encore des enthymèmes où les propositions qu’on croit évidentes sont supprimées. Et tout cela joint avec des conséquences asyllogistiques et avec des transpositions des propositions, et avec quantité de tours et pensées qui cachent ces propositions par l’inclination naturelle de l’esprit à abréger, et par les propriétés du langage, qui paraissent en partie dans l’emploi des particules, fera un tissu de raisonnements, qui représentera toute argumentation même d’un orateur, mais décharnée et dépouillée de ses ornements et réduite à la fomie logique, non pas scolastiquement, mais toujours suffisamment pour connaître la force, suivant les lois de la logique, qui ne sont autres que celles du bon sens mises en ordre et par écrit, et qui n’en diffèrent pas plus que la coutume d’une province diffère de ce qu’elle avait été quand de non écrite qu’elle était elle est devenue écrite, si ce n’est qu’étant mise par écrit et se pouvant mieux envisager tout d’un coup, elle fournit plus de lumière pour pouvoir être poussée et appliquée ; car le bon sens naturel, sans l’aide de l’art faisant l’analyse de quelque raisonnement, sera un peu en peine quelquefois sur la force des conséquences, en en trouvant, par exemple, qui enveloppent