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des philosophes, de deux genres, l’un logique seulement, l’autre encore réel ; et de deux matières, l’une physique, qui est celle des corps, l’autre métaphysique seulement ou générale, comme si quelqu’un disait que deux parties de l’espace sont d’une même matière ou que deux heures sont aussi entre elles d’une même matière. Cependant ces distinctions ne sont pas seulement des termes, mais des choses mêmes et semblent venir bien à propos ici, où leur confusion a fait naître une fausse conséquence. Ces deux genres ont une notion commune, et celle du genre réel est commune aux deux matières, de sorte que leur généalogie sera telle :

Genre Logique, seulement varié par des différences simples.
Réel, dont les différences sont des modifications, c’est-à-dire matière.
Métaphysique, seulement où il y a homogénéité.
Physique, où il y a une masse homogène solide.

Je n’ai pas vu la seconde lettre de l’auteur à l’évêque. La réponse que ce prélat y fait ne touche guère au point qui regarde la pensée de la matière ; mais la réplique de notre auteur à cette seconde réponse y retourne. « Dieu (dit-il à peu près dans ces termes, p. 397) ajoute à l’essence de la matière les qualités et perfection qui lui plaisent : le mouvement simple dans quelques parties, mais dans les plantes la végétation, et dans les animaux le sentiment. Ceux qui en demeurent d’accord jusqu’ici se récrient aussitôt qu’on fait encore un pas, pour dire que Dieu peut donner à la matière pensée, raison, volonté, comme si cela détruisait l’essence de la matière. Mais, pour le prouver, ils allèguent que la pensée ou raison n’est pas renfermée dans l’essence de la matière ; ce qui ne fait rien, puisque le mouvement et la vie n’y sont pas renfermés non plus. Ils allèguent aussi qu’on ne saurait concevoir que la matière pense. Mais notre conception n’est pas la mesure du pouvoir de Dieu ». Après cela, il cite l’exemple de l’attraction de la matière, p. 99, mais surtout p. 408, où il parle de la gravitation de la matière vers la matière, attribuée à M. Newton, dans les termes que j’ai cités ci-dessus, avouant qu’on n’en saurait jamais concevoir le comment. Ce qui est, en effet, retourner aux qualités occultes, ou, qui plus est, inexplicables. Il ajoute (p. 401) que rien n’est plus propre à favoriser les sceptiques que de nier ce qu’on n’entend point, et (p. 402) qu’on ne conçoit pas même comment l’âme pense. Il veut (p. 403) que les deux substances, la matérielle et l’immatérielle, pouvant être conçues dans