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du simple au composé ; mais lorsqu’il s’agit de trouver justement le moyen de faire ce qu’on se propose, la synthèse ne suffit pas ordinairement, et souvent ce serait la mer à boire que de vouloir faire toutes les combinaisons requises quoiqu’on puisse souvent s’y aider par la méthode des exclusions qui retranche une bonne partie des combinaisons inutiles, et souvent la nature n’admet point d’autre méthode. Mais on n’a pas toujours les moyens de bien suivre celle-ci. C’est donc à l’analyse de nous donner un fil dans ce labyrinthe lorsque cela se peut, car il y a un fil dans ce labyrinthe lorsque cela se peut, car il y a des cas où la nature même de la question exige qu’on aille tâtonner partout, les abrégés n’étant pas toujours possibles.

§8. PHILALÈTHE. Or comme en démontrant l’on suppose toujours les connaissances intuitives, cela, je pense, a donné occasion à cet axiome : que « tout raisonnement vient de choses déjà connues et déjà accordées » (ex praecognitis et praeconcessis). Mais nous aurons occasion de parler du faux qu’il y a dans cet axiome lorsque nous parlerons des maximes qu’on prend mal à propos pour les fondements de nos raisonnements.

THÉOPHILE. Je serai curieux d’apprendre quel faux vous pourrez trouver dans un axiome qui paraît si raisonnable. S’il fallait toujours tout réduire aux connaissances intuitives, les démonstrations seraient souvent d’une prolixité insupportable. C’est pourquoi les mathématiciens ont eu l’adresse de partager les difficultés et de démontrer à par des propositions intervenantes. Et il y a de l’art encore en cela ; car comme les vérités moyennes (qu’on appelle des lemmes lorsqu’elles paraissent être hors d’œuvre), se peuvent assigner de plusieurs façons, il est bon, pour aider la compréhension et la mémoire, d’en choisir, qui abrègent beaucoup et qui paraissent mémorables et dignes par elles-mêmes d’être démontrées. Mais il y a un autre empêchement, c’est qu’il n’est pas aisé de démontrer tous les axiomes et de réduire entièrement les démonstrations aux connaissances intuitives. Et si on avait voulu attendre cela, peut-être que nous n’aurions pas encore la science de la géométrie. Mais c’est de quoi nous avons déjà parlé dans nos premières conversations, et nous aurons occasion d’en dire davantage.

§ 9. PHILALÈTHE. Nous y viendrons tantôt : maintenant je remarquerai encore ce que j’ai déjà touché plus d’une fois, que c’est une commune opinion, qu’il n’y a que les sciences mathématiques qui soient capables d’une certitude démonstrative, mais comme la convenance et la disconvenance, qui se peut connaître intuitivement, n’est