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dessus que nous avons toujours une infinité de petites perceptions, sans nous en apercevoir. Nous ne sommes jamais sans perceptions, mais il est nécessaire que nous soyons souvent sans aperceptions, savoir lorsqu’il n’y a point des perceptions distinguées. C’est faute d’avoir considéré ce point important qu’une philosophie relâchée et aussi peu noble que peu solide a prévalu auprès de tant de bons esprits, et que nous avons ignoré presque jusqu’ici ce qu’il y a de plus beau dans les âmes. Ce qui a fait aussi qu’on a trouvé tant d’apparence dans cette erreur, qui enseigne que les âmes sont d’une nature périssable.


§ 1. Philalèthe. Comme les sensations du corps de même que les pensées de l’esprit sont ou indifférentes ou suivies de plaisir ou de douleur, on ne peut décrire ces idées non plus que toutes les autres idées simples ni donner aucune définition des mots dont on se sert pour les désigner.

Théophile. Je crois qu’il n’y a point de perceptions qui nous soient tout à fait indifférentes, mais c’est assez que leur effet ne soit point notable pour qu’on les puisse appeler ainsi, car le plaisir ou la douleur paraît consister dans une aide ou dans un empêchement notable. J’avoue que cette définition n’est point nominale, et qu’on n’en peut point donner.

§ 2. Philalèthe. Le bien est ce qui est propre à produire et a augmenter le plaisir en nous, ou à diminuer et abréger quelque douleur. Le mal est propre à produire ou augmenter la douleur en nous ou à diminuer quelque plaisir.

Théophile. Je suis aussi de cette opinion. On divise le bien en honnête, agréable et utile, mais dans le fond je crois qu’il faut qu’il soit ou agréable lui-même, ou servant à quelque autre, qui nous puisse donner un sentiment agréable, c’est-à-dire le bien est agréable ou utile, et l’honnête lui-même consiste dans un plaisir d’esprit.

§ 4, 5. Philalèthe. Du plaisir et de la douleur viennent le, passions : on a de l’amour pour ce qui peut produire du plaisir, et lu pensée de la tristesse ou de la douleur, qu’une cause présente ou absentr peut produire, est la haine. Mais la haine ou l’amour qui sr rapportent à