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eternelles de la metaphysique et de la geometrie, et par consequent aussi les regles de la bonté, de la justice et de la perfection ne sont que des effects de la volonté de Dieu, au lieu qu’il me semble, que ce ne sont que des suites de son entendement, qui, assurement[1] ne depend point de sa volonté, 5 non plus que son essence.

*2 III. Contre ceux qui croyent que Dieu auroit pu mieux faire. *Je ne sçaurois non plus approuver l’opinion de quelques modernes[2] qui soutiennent hardiment, que ce que Dieu fait n’est pas dans la derniere perfection. et qu’il auroit pû agir bien mieux[3]. 10 Car il me semble que les suites de ce sentiment sont tout à fait contraires à la gloire de Dieu. Uti minus malum habet rationem boni, ita minus bonum habet rationem mali. Et c’est agir imparfaitement que d’agir avec moins de perfection qu’on n’auroit pù. C’est trouver à redire à un ouvrage d’un 15 architecte que de monstrer[4] qu’il le pouvoist faire meilleur. Cela va encore contre la sainte écriture, lors qu’elle nous asseure de la bonté des ouvrages de Dieu. Car comme[5] les imperfections descendent à l’infini de quelque façon que Dieu auroit fait son ouvrage, il auroit tousjours été bon en comparaison des moins 20 parfaits, si cela estoit assez ; mais une chose n’est gueres louable, quand elle ne l’est que de cette maniere. Je croy aussi qu’on trouvera une infinité de passages de la divine écriture et des SS. Peres, qui favoriseront mon sentiment, mais qu’on n’en trouvera gueres pour celuy de ces modernes[6], qui est à 25 mon avis inconnu à toute l’antiquité, et ne se fonde que sur le trop peu de connoissance que nous avons de l’harmonie generale

  1. Ce mot est omis par les précédents éditeurs.
  2. [scholastiques] modernes qui [s’imaginent].
  3. [qu’il n’a fait].
  4. [en monstrant] [qu’avec les mêmes frais].
  5. [Car] [Comme] [s’ils peuvent être rendus].
  6. [nouveaux scholastiques] [qui ne l’appuient que sur quelques subtilités] [peu solides] [comme de dire qu’il n’y a].