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Discours touchant la methode de la certitude et l’art d’inventer.

resolution de faire quelque puissant effort pour les sciences, je suis asseuré que la seule volonté d’un tel Monarque feroit plus d’effect que toutes nos Méthodes et tout nostre sçavoir pour abreger le temps, et pour nous faire obtenir en peu d’années ce qui ne seroit autrement qu’un fruit de plusieurs siecles. Ce qu’Alexandre fit faire par Aristote, n’entreroit point en comparaison et déja les Memoires de l’Academie et les productions de l’observatoire le passent infiniment. Mais ce seroit bien autre chose, si ce grand Prince faisoit faire pour les decouvertes utiles tout ce qui se peut, et tout ce qui est dans le pouvoir des hommes, c’est à dire dans le sien, qui renferme comme en raccourci presque toute la puissance humaine à cet egard, d’autant qu’il n’y a gueres d’exemples d’une seule personne qui ait pû faire plus que luy. Sa bonne volonté ne cede point à son pouvoir, et le seul motif de la charité sans appeler la gloire à son secours luy suffisoit à s’abbaisser jusqu’au détail de quelques remedes particulier, mais éprouvés par le soulagement des hommes, ce que le monde n’a appris que bien tard, et cependant je le tiens aussi glorieux que des conquestes. J’oseray dire qu’il est en etat de faire plus de decouvertes que tous les Mathematiciens et plus de cures que tous les Medecins feroient sans luy, parce qu’il peut donner des ordres et faire des reglemens à mettre les sciences dans un train d’avancer en peu de temps d’une maniere surprenante, qui rendroit son regne et son siècle aussi remarquable de ce costé, que de tous les autres, dont il auroit aussi principalement toute la gloire et dont la postérité lui demeureroit redevable à jamais. Outre que les autres grandes choses qu’il fait, de quelque éclat et de quelque etendue qu’elles soyent, n’appartiennent point à tous les hommes, les seules decouvertes utiles qui servent à démonstrer des verités importantes pour la pieté et la tranquillité de l’esprit, à diminuer nos maux et à augmenter la puissance des hommes sur la nature, sont de toutes les nations et de tous les ages. Il ne reste donc que d’informer ce grand Prince de tout ce qu’il peut ; ce soin appartient aux illustres qui l’approchent de plus pres, mais comme ils sont tous chargés de grandes occupations, il est du devoir des autres de leur fournir des memoires, et si ce petit papier y pouvoit servir parmy d’autres, il auroit esté assez bien employé.

Cependant il me semble, que nous ne profitons pas encor assez des graces du ciel ny des lumières et dispositions avantageuses de nostre siecle, et du penchant que les plus grands Princes temoignent à proteger et faire