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236 Essais de Théodicée.

204. Il paroit à M. Bayle (p. 1063) que M. Diroys a confondu deux propositions différentes, l’une, que Dieu doit faire toutes choses comme des personnes sages et vertueuses souhaiteroient qu’elle se tissent, suivant les règles de sagesse et de bonté que Dieu leur a imprimées, et comme ils seroient obligés de les faire eux mêmes, si elles dépendoient d’eux ; et l’autre, qu’il n’est pas convenable à la Sagesse et à la Bonté souveraine de ne faire pas ce qui est meilleur et plus parfait. M. Diroys (au jugement de M. Bayle) n’objecte la première proposition, et repond à la seconde. Mais il a raison en eela, ce me semble ; car ces deux propositions sont liées, la seconde est une suite de la première : faire moins de bien qu’on ne pouvoit, est manquer contre la sagesse ou contre la bonté. Être le meilleur, et être désiré par les plus vertueux et les plus sages, est la même chose. Et l’on peut dire que si nous pouvions entendre la structure et Poéconomie de l’Univers, nous trouverions qu’il est fait et gouverné comme les plus sages et les plus vertueux le pourroient souhaiter, Dieu ne pouvant manquer de faire ainsi. Cependant cette nécessite n’est que morale : et j’avoue que si Dieu étoit nécessite par une nécessite métaphysique à produire ce qu’il fait, il produiroit tous les possibles, ou rien ; et dans ce sens la conséquence de M. Bayle seroit fort juste. Mais comme tous les possibles ne sont point compatibles entr’eux dans une même suite d’univers, c’est pour cela même que tous les possibles ne sauroient être produits, et qu’on doit dire que Dieu n’est point nécessite, métaphysiquement parlant, à la création de ce monde. L’on peut dire qu’aussitôt que Dieu a decerné de créer quelque chose, il y a un combat entre tous les possibles, tous prétendans à l’existence ; et que ceux qui joints ensemble produisent le plus de realité, le plus de perfection, le plus d’intelligibilité, l’emportent. Il est vray que tout ce combat ne peut être qu’idéal, c’est à dire il ne peut être qu’un conflit de raisons dans l’entendement le plus parfait, qui ne peut manquer d’agir de la manière la plus parfaite, et par conséquent de choisir le mieux. Cependant Dieu est obligé par une nécessite morale, à faire les choses en sorte qu’il ne se puisse rien de mieux : autrement non seulement d’autres auroient sujet de critiquer ce qu’il fait, mais qui plus est, il ne seroit pas content luy même de son ouvrage, il s’en reprocheroit l’imperfection ; ce qui est contre la souveraine felicité de la nature Divine. Ce sentiment continuel de sa propre faute ou imperfection luy seroit une source inevi-