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III.

Vous me demandez, Monsieur, les raisons que j’ai de croire que l’Idée du Corps ou de la matière est autre que celle de l’étendue. Il est vrai, comme vous dites que bien d’habiles gens sont prévenus aujourd’hui de ce sentiment, que l’essence du corps consiste dans la longueur, largeur et profondeur. Cependant il y en a encore, qu’on ne peut pas accuser de trop d’attachement à la scolastique, qui n’en sont pas contents.

M. Nicole dans un endroit de ses essais témoigne d’être de ce nombre, et il lui semble qu’il y a plus de prévention que de lumière dans ceux qui ne paraissent pas effrayés des difficultés, qui s’y trouvent.

Il faudrait un discours fort ample pour expliquer bien distinctement ce que je pense là-dessus ; cependant voici quelques considérations que je soumets à votre jugement dont je vous supplie de me faire part.

Si l’essence du corps consistait dans l’étendue, cette étendue seule devait suffire pour rendre raison de toutes les affections du corps : mais cela n’est point. Nous remarquons dans la matière une qualité, que quelques-uns ont appelée l’inertie Naturelle, par laquelle le corps résiste en quelque façon au mouvement, en sorte qu’il faut employer quelque force pour l’y mettre (faisant même abstraction de la pesanteur) et qu’un grand corps est plus difficilement ébranlé qu’un petit corps. Par exemple fig. 1 : Si le corps A en mouvement rencontre le corps B en repos, il est clair que si le corps B était indifférent au mouvement ou au repos, il se laisserait pousser par le corps A, sans lui résister et sans diminuer la vitesse ou changer la direction du corps A ; et après le concours, A continuerait son chemin et B irait avec lui de compagnie, en le devançant. Mais il n’en est pas ainsi dans la nature ; plus le corps B est grand, plus diminuera-t-il la vitesse, avec laquelle vient le corps A, jusqu’à l’obliger même de réfléchir si B est plus grand que A. Or s’il n’y avoit dans les corps que l’étendue, ou la situation,