jour-là le grand homme d’État se doubla du plus habile des diplomates ; le 3 mai, parce que Lamartine sacrifia au salut de la cité, bien plus que sa vie qu’il exposait à chaque minute en riant, sa popularité.
Je puis m’appuyer ici sur quelques détails précis et personnels.
En mars 1848, une maison située rue de Rivoli, au coin de la place des Pyramides, et affectée à l’administration de la maison du roi, fut occupée révolutionnairement par un jeune homme complètement inconnu trois mois auparavant, et devenu tout à coup redoutable par la publication d’un journal dont le titre seul était une menace. Ce journal s’appelait la Commune de Paris ; le journaliste s’appelait Sobrier. Je connaissais Sobrier : il avait de vingt-cinq à vingt-six ans, il était honnête, convaincu et fanatique jusqu’à l’illuminisme ; il avait donné un témoignage irrécusable de sa sincérité : il fit offrande à la République de toute sa fortune, douze mille livres de rente… Si tous les intransigeants étaient forcés de fournir de pareilles preuves, leur nombre serait peut-être encore plus petit. Rien ne touche les masses comme le désintéressement. Aussi, Sobrier avait-il une réelle action sur les ouvriers de Paris. La veille ou le lendemain des grands événements, paraissaient, placardées à tous les coins de rues, de petites affiches d’un rouge violet, portant ces mots laconiques et menaçants : « Le peuple n’est pas satisfait de la journée d’hier. Si le gouvernement provisoire retombe dans de pareilles fautes, nous sommes deux cent mille qui irons lui rappeler ses devoirs. Signé : Sobrier. » Ce