II
On a beaucoup accusé Lamartine d’orgueil, et l’on cite toujours sa fameuse réponse à un père qui lui avait amené son fils. ― « Eh bien ! Monsieur de Lamartine, que pensez-vous de mon jeune homme ? ― Il n’a pas été assez ému en me voyant, répliqua le poète. » Pour qui réfléchit, et pour qui connaît Lamartine, il n’y a pas là trace d’amour-propre. Ce n’est pas à lui qu’il pensait en parlant ainsi ; c’était à une grande renommée quelconque. Il n’aurait jamais dit ce mot s’il se l’était appliqué à lui-même ; l’appliquant à tous les hommes supérieurs, il avait mille fois raison. Un jeune homme qui n’admire pas, n’est pas jeune. Du reste, je vais dire un mot qui étonnera bien des lecteurs, Lamartine était modeste, d’une modestie relative, bien entendu. Il avait même quelques amours-propres fort singuliers ; il se croyait, par exemple, un grand économiste, un grand vigneron et un grand architecte. « Jeune homme, dit-il un jour au fils d’un de ses amis, regardez-vous bien là, au front, et dites-vous que vous venez de voir le premier financier du monde. » La gloire de Victor Hugo ne l’offusquait pas ; mais le titre de premier viticulteur de France, accordé à M. Duchâtel,