bien certain de vous avoir rencontré déjà, peut-être plus d’une fois, dans quelque autre planète ; nous étions donc deux vieilles connaissances ; nous nous retrouvions. »
Un événement imprévu fit de notre amitié un lien quasi fraternel. Reynaud était souvent saisi de ces besoins de solitude, habituels aux esprits qui vivent dans la pensée de l’infini. Vers 1842 il se retira donc à Vineuil, village voisin de Chantilly, pour se dévouer tout entier à ses grands travaux de philosophie religieuse. Il vivait là seul, dans une maison isolée, travaillant tout le jour, se promenant et méditant dans un petit jardin fort inculte, où régnaient en maîtres quelques animaux privés. Il a toujours eu un goût excessif pour la société des animaux. Leur vue le touchait, le charmait et le troublait. Le mystère de leurs souffrances, inexplicables par l’idée d’épreuves, et par conséquent inconciliables, ce semble, avec la bonté de Dieu, le ramenait sans cesse à la contemplation de ces muettes créatures, dont la beauté était encore un attrait pour lui. Artiste en effet autant que philosophe, il se complaisait dans la vue des animaux élégants et surtout des beaux plumages d’oiseaux ; s’il avait été riche, ç’aurait été sa manière d’avoir des bijoux.
Sans être riche, il avait reçu du Jardin des Plantes, en échange d’une curieuse collection de nids conquis par lui, deux superbes paons. Je les vois encore apparaître sur le bord de la fenêtre, dans la salle à manger basse où nous dînions à Vineuil. Ils venaient prendre