essayé de transporter au théâtre, changeant seulement la défection en trahison.
La pièce à peine reçue, les répétitions commencèrent et confirmèrent ces heureux pronostics de la lecture. La veille de la première représentation, une actrice du Théâtre-Français, qui ne jouait pas dans mon drame, Mlle Anaïs, me dit : « Il paraît qu’on va vous élever une statue demain ! » Par malheur, la représentation ne réalisa pas tout à fait ces beaux présages.
Succès très réel, très vif même, pour la première partie, froideur bienveillante pour la dernière. En sortant de la salle, je rencontrait Mlle Mars, qui me dit : « Trop sévère ! mon cher ami, trop sévère ! » La pièce me fit honneur, mais ne fit pas d’argent. Elle me valut pourtant une faveur précieuse, l’amitié de Scribe qui voulut bien assister à la répétition, et qui resta très partisan de l’ouvrage, puis deux distinctions : d’abord la croix, et ensuite une invitation de bal. A ce moment, le duc de Nemours donnait au pavillon de Marsan des bals très brillants. Les invitations étaient fort recherchées, on n’y était admis qu’en habit à la française, culotte de casimir blanc, bas de soie blancs, et l’épée au côté. On me fit dire du château que le Prince avait été très frappé de mon drame, et qu’il m’adresserait volontiers une invitation, s’il était sûr que j’accepterais. J’acceptai. Dès que l’huissier annonça mon nom, le Duc vint à moi, ce qui ne laissa pas que de me troubler un peu, je n’avais jamais parlé à un prince du sang, mais mon embarras disparut bien vite, quand je vis le sien. La timidité est une grâce chez les personnages d’un haut