en face de vous, ce petit monsieur avec des lunettes ? ― Oui. ― Eh bien, c’est lui qui m’apprend mon opinion. Comme nous sommes toujours d’un avis contraire, quand il se lève, je reste assis, et quand il reste assis, je me lève, de confiance ; il écoute pour moi. »
Eugène Sue ne prit pas la politique de cette façon insouciante. Il y porta une passion ardente et convaincue.
Quand vint le Deux-Décembre, il protesta énergiquement contre les décrets, et fut placé par M. de Morny sur la liste des représentants à arrêter. Napoléon le raya de sa main, se rappelant qu’Eugène Sue était le filleul de sa mère. E. Sue refusa cette grâce et se constitua prisonnier au fort de Vanves avec les autres députés. La loi d’exil promulguée, il n’y vit pas son nom, que Napoléon avait effacé pour la seconde fois. Pour la seconde fois aussi E. Sue repoussa cette faveur comme une offense, et s’exila volontairement à Annecy. Il y vécut trois ans, travaillant toujours, affirmant de plus en plus ses principes républicains, poussant trop loin, selon moi, ses théories radicales, mais corrigeant ses théories par ses actes, et consacrant une partie du fruit de son travail à venir en aide à tout ce qui était malheureux autour de lui. Eugène Sue le sceptique ! Eugène Sue le gouailleur ! Eugène Sue le matérialiste ! donnait chaque année, sans être devenu catholique, une somme considérable au curé d’Annecy pour ses pauvre. Qui l’avait converti ? son œuvre !