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À ses pleurs, à ses cris, à ce grand dévouement,
Les meurtriers émus s’arrêtent un moment :
Elle voit leur pitié, saisit l’instant prospère,
Du milieu des bourreaux elle enlève son père,
Et traverse les murs ensanglantés par eux,
Portant ce poids chéri dans ses bras généreux.
Jouis de ton triomphe, ô moderne Antigone !
Quel que soit le débat et du peuple et du trône,
Tes saints efforts vivront d’âge en âge bénis :
Pour admirer ton cœur tous les cœurs sont unis ;
Et ton zèle, à jamais cher aux partis contraires,
Est des enfants l’exemple et la gloire des pères.
Faut-il qu’au meurtre en vain son père ait échappé !
Des brigands l’ont absous, des juges l’ont frappé !

Tel brille en ses vertus un sexe qu’on déprime.
Que sous nos pas tremblants le sort creuse un abîme,
Il s’y jette avec nous, ou devient notre appui ;
Toujours le malheureux se repose sur lui.
L’heureux même lui doit ses plaisirs d’âge en âge ;
Et, quand son front des ans atteste le ravage,
Une femme embellit jusqu’à ses derniers jours.
Au terme de sa course, il s’applaudit toujours
De voir à ses côtés l’épouse tendre et sage
Avec qui de la vie il a fait le voyage,
Et la fille naïve à qui, pour le chérir,