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Ne veut que ces plaisirs où l’on se fuit soi-même,
Qui craignez de sentir, d’éveiller vos langueurs,
Ces tableaux éloquents sont muets pour vos cœurs ;
Mais toi, qui des beaux-arts sens les flammes divines,
Ton âme entend la voix des cercueils, des ruines.
De la destruction recherchant les travaux,
Des états écroulés tu fouilles les tombeaux.
On te voit, arrêté sur les bords du Scamandre,
De l’antique Ilion interroger la cendre ;
On te voit dans Palmyre, attentif et surpris,
Consulter sa grande ombre et ses savants débris.
Quel livre à ton génie offrent de tels décombres !
Sur ces riches lambeaux, sur ces ruines sombres
Qui, là, sans majesté, rampent dans les déserts,
Ici, d’un front altier se dressent dans les airs,
Mais dont les traits usés et les rides sauvages
Des ans, qui rongent tout, attestent les ravages,
Tu lis, le cœur saisi d’un agréable effroi,
La marche de ce temps qui roule aussi sur toi,
Des révolutions les soudaines tempêtes,
La chute des états, la trace des conquêtes ;
L’empreinte des volcans et des flots destructeurs,
Et la haute leçon du néant des grandeurs ;
Et, des siècles sur eux contemplant les injures,
De ces grands corps brisés tu comptes les blessures ;
Tes yeux et tes esprits sont par eux exaltés.