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A quoi son confident Fabian, avec cette bonhomie familière dont Corneille a le secret, lui répond :

 
Laissez à son destin cette ingrate famille
Qu’il accorde, s’il veut, le père avec la fille,
Polyeucte et Félix, l’épouse avec l’époux,
D’un si cruel effort quel prix espérez-vous ?


A ce mot, Sévère bondit et, d’une voix vibrante :

 
La gloire de montrer à cette âme si belle
Que Sévère l’égale et qu’il est digne d’elle,


Là-dessus, le voilà qui à son tour s’élance dans son idéal à lui, l’idéal terrestre, l’idéal de l’honneur, de la générosité, du dévouement ! Que lui importe la colère de l’empereur Décie ? Que lui importe sa propre disgrâce ? Que lui importe la mort même ? Et c’est ainsi que, de degrés en degrés, montant toujours, il en arrive à cette célèbre tirade :

 

La secte des chrétiens n’est pas ce que l’on pense.


Arrêtons-nous ici un moment, car nous touchons au point le plus significatif de cette analyse. Le XVIIIe siècle a applaudi ce morceau avec enthousiasme, comme le plus éloquent appel à la tolérance, et Voltaire l’a défini : la condamnation de tous les persécuteurs. Partant